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C'est avec beaucoup de bonheur que je vous ouvre les portes de mon jardin secret. J'espère que vous aurez grand plaisir à vous y perdre et à partager l'amour des mots et celui de la poésie.

Je vous souhaite un bon voyage !

Vanessa

A méditer ...

  La vraie générosité envers l'avenir consiste à tout donner au présent.

Albert Camus

1 septembre 2008 1 01 /09 /septembre /2008 08:21











De Chaplin à Hitchcock

De Chagall à Degas

De Zola à Steinbeck

Qu’ils soient le Kid ou Marnie

Daphnis et Chloe ou l’Etoile

Nana ou bien Caleb et Aron

Ils ont tout comme vous

Traversés le temps

Marquant nos esprits

Influant sur nos vies

Ouvrant nos yeux

Sur la beauté de l’Art

 

Vous aviez le talent,

Le don et le génie

De votre Art

Une vie riche

De labeur et de succès

De découragements aussi

Et de revers de fortune

La postérité pour se souvenir de vous

Une éternité à vous regretter


Paris, le 24 Juillet 2008


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31 août 2008 7 31 /08 /août /2008 17:15














New York City

Taximan du Bangladesh

Ou d’ailleurs

Tu te faufiles

Entre Broadway

Et Times Square

 

New York City

Les buildings se dressent

Dans le ciel

Et côtoient les étoiles

D’ici et d’ailleurs

 

New York City

Tes néons multicolores

Tes affiches en 200 sur 100

Et tes comédies musicales

Habillent rues et quartiers

De Brooklyn au Bronx

De Manhattan au Queens

Animées du soir au matin

24 heures sur 24

 

New York City

Vibre et s’anime

Au rythme des klaxons

Et des badauds

Pressés de dépenser

Quelques billets verts

Chez Macy’s ou bien ailleurs


New York City

Altière et ardente

Tu brilles à jamais

De mille lumières

Au firmament du monde

 

Paris, le 23 Juillet 2008


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29 août 2008 5 29 /08 /août /2008 23:13










En faisant mon jogging ce matin dans les allées de Central Park, une question me taraude l’esprit. Elle me vrille le crâne, bourdonne, gelant, surgelant même toute possibilité de savourer cet instant privilégié. Il est vrai que j’ai toujours eu à cœur de préserver ces précieuses occasions où le temps semble avoir suspendu son vol. J’aime à me lover dans cette bulle de savon où plus rien ne peut m’atteindre. Emoustillée par la brise légère, je me grise de ces foulées qui me portent au gré de mes humeurs. Mais aujourd’hui, rien à faire. Impossible de me laisser aller. Mes pensées se focalisent sur cette épine. Elle me darde, enfle comme une tumeur et emplit mon cerveau. A bien y réfléchir, je crois bien que la conversation avec ma mère la veille au soir, m’a ébranlée plus que je ne l’imaginais. Loin d’être candide, je pressens de nouvelles difficultés. Le ton saccadé de sa voix comme si un mauvais génie avait pris plaisir à rayer de hachures sur le sillon d’un 33 tours, ne laisse planer aucun doute. Je ne serai pas étonnée d’apprendre qu’elle s’est une fois encore empêtrée dans les ennuis financiers. Nul doute qu’à l’heure où je trottine, les dettes ne cessent de s’accumuler. Acculée, je crois qu’elle n’entrevoit plus aucune combine pour la sortir de cette panade. Alors, évidemment je me fais du souci. Et puis, je ne peux m’empêcher de culpabiliser à l’idée de la savoir seule à des kilomètres, loin de moi. J’aimerais pouvoir la rassurer, l’enlacer et lui dire que tout va s’arranger. Mais, au fond de moi, je sais qu’il n’en est rien. A la mort de mon beau-père, ma mère a inévitablement sombré dans les tréfonds d’une profonde dépression. Elle s’est mise à fréquenter les casinos de la région, s’enivrant des heures durant voire des journées entières en actionnant fiévreusement la manette des bandits manchots. C’est ainsi au fil des années qu’elle est devenue addicted au jeu et que les problèmes ont commencé. Pour son plus grand malheur, une obscure cour d’obséquieux a fait rempart autour d’elle la privant de toute lucidité. Il aurait fallu qu’elle fasse le ménage mais il était bien trop tard. Prise dans un engrenage infernal, elle butait sur les murs qu’elle avait soigneusement bâtis. Elle perdait pied un peu plus chaque jour et personne n’était là pour lui tendre la main. Je n’étais pas là pour déclencher le déclic, la petite étincelle, l’électricité nécessaire qui lui ferait envisager son avenir différemment. Alors ce matin, au lieu d’enfiler mon tailleur et de jouer à l’executive-woman, je vais faire ce que j’aurais dû faire depuis déjà bien longtemps ; filer à l’aéroport attraper le premier vol en partance pour Paris.


Paris, le 29 Août 2008


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27 août 2008 3 27 /08 /août /2008 08:27











La vie serait-elle pareille à un film

Où nous aurions le cut final

Où nous pourrions au gré de nos états d’âme

Prendre la bobine de notre existence

Et remonter le fil de notre parcours ?

 

Un fondu-enchaîné et on oublie tout

On hésite, un split-screen

Un plan de coupe, un raccord

Et le tour est joué

Pieds de nez au destin

Un nouvel éclairage

Et la bande-image de notre vie défile sur l’écran

Plus belle encore que dans nos rêves

 

Mais quoi ?

La vie est-elle une projection

Où du clap d’ouverture au clap de fin

Tout serait sous notre contrôle ?

 

Non, mille fois non !

Alors permettez

Appuyons sur le bouton « Stop »

Et laissez-moi faire un flash-back !

 

Au nom de la vie qu’Il nous a insufflé,

Faisons de nos erreurs de nouveau des forces,

Réjouissons-nous de l’imprévu et des aléas de la vie

Et continuons à laisser cette part de magie à Dieu et à lui seul !



Paris, le 26 Août 2008

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26 août 2008 2 26 /08 /août /2008 18:54










Ils accourent de partout

Succions et halètements se bousculent

Ils viennent et grouillent

Dans les moindres recoins de ma tête

Ils s’immiscent et bloquent mes neurones,

Se tapissent dans chaque interstice,

Ne me laissent aucun répit

 

Traquée,

Impossible de reculer

Ils sont là, près de moi,

A gauche, à droite,

Tapis dans l’ombre,

Ils sont prêts à lancer l’assaut

 

Ils veulent ma peau

Je le sens, je le sais

Désormais, plus rien ne peut les arrêter

L’hallali a sonné

Ils ne me laisseront pas m’en tirer

 

A l’aube de ma jeunesse,

J’exhale mon dernier souffle

J’avais tellement soif de vie et d’amour

Mais, le temps m’est compté

Je le sais

Alors, venez et finissez-en !

Je n’ai plus peur de vous



Paris, le 25 Août 2008

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23 juin 2008 1 23 /06 /juin /2008 20:37










Uriel et Euxane. Deux prénoms sonnant comme un défi. Un homme et une femme. Les tout derniers survivants de l'île de la terre du Levant. Uriel et Euxane, seuls sur cette terre rejetée au Nord-Est de l’Islande.


Depuis quelques jours, une pluie dense s’est abattue sur l’archipel. Pas une de ces pluies fines qui vous caressent le visage. Non, une pluie drue qui vous casse le dos, vous fait ramper à terre, dans la boue, comme un animal. Une de celle qui vous dit que vous n’êtes qu’un étranger sur cette terre hostile. Une de celle qui vous rappelle que vous n’êtes rien, que vous n’êtes que de passage ici-bas. Ne jamais oublier que l’on vous tolère. Ne pas s’imaginer que l’on puisse s’aventurer impunément dans les pas de l’Humanité. Point de révolte ici. Pas un mot plus haut que l’autre. Il faut savoir marcher en rang sinon tu crèves.


Alors évidemment, lorsque toute une civilisation avait eu des velléités de rébellion, la Nature n’avait pu rester de marbre. Les habitants de l'île de la terre du Levant s’étaient développés de façon démesurée, surpeuplant ce lieu béni autrefois si serein. Ils avaient tant et si bien prospérés qu’ils avaient envahi le territoire ne laissant plus une seule parcelle inoccupée. Ils étaient trop nombreux. Et puis, ils se comportaient si mal. Elle ne pouvait le permettre. Il était de son devoir de réagir. Alors, c’est vrai, elle avait mis le paquet. Elle n’avait pas fait de quartier. Au son de l’ocarina, instrument traditionnel de l’île, tout avait été anéanti. Réduit à néant ou presque puisqu’Uriel et Euxane étaient encore là. Certes amoindris mais ils résistaient. Quel était donc leur secret ? Pourquoi avaient-ils réchappé aux tornades et ouragans ? Jour après jour, les éléments s’étaient déchaînés sur ce peuple qui avait cru pouvoir lutter ? Qu’avaient-ils de plus que les autres ? Leurs amis et leurs familles avaient été décimés, les uns après les autres. Personne n’avait pu vaincre les forces de la Nature. Aux tornades et ouragans avaient succédé les tremblements de terre. Les survivants n’avaient eu aucune trêve en voyant surgir des invasions de sauterelles ainsi que des nuées de guêpes attaquant sans répit petits et grands. Ils avaient succombé dans d’atroces souffrances. Rien n’avait pu les sauver. Ils étaient perdus. Leurs âmes n’avaient pas su trouver le chemin. Désormais, cette Terre ne pouvait plus recueillir cette population qui n’avait pas su respecter la Nature. Ils s’étaient tout permis ; alors, celle-ci avait décidé d’en finir. D’en terminer une bonne fois pour toute.


Devant une telle démonstration de violence, Uriel et Euxane ne pensaient pas couper à la colère de la Nature. Résignés, ils avaient attendu que la Mort vienne les faucher et puis non, rien ne s’était produit. Ils étaient là. Depuis quelques instants, les éléments s’étaient apaisés. La Nature avait épargné Uriel et Euxane. Mais, qu’allaient-ils advenir d’eux ? Orphelins sur l'île de la terre du Levant, allaient-ils pouvoir survivre ? Comment résister ?


Tout n’était que néant et désolation autour d’eux. Quelques végétations subsistaient ça et là. Au milieu du chaos, ils aperçurent un arbuste, appelé la coque du levant, réputé pour sa fertilité sous lequel ils s’abritèrent. Autrefois, Uriel avait appris ses bienfaits dans le vieux manuscrit de son aïeul féru de botanique. Il y était écrit que le breuvage de quelques gouttes de la sève de cet arbrisseau suffisait à redonner vie à toute forme d’aridité. Uriel déplia le foulard mauve d’Euxane et lui fit signe de s’asseoir. Il sortit de son pantalon une lame qu’il planta dans la chair tendre de l’arbre et pratiqua une légère incision. A l’aide d’un morceau de miroir, il récupéra la sève qui s’échappait du tronc et la fit boire à la belle Euxane. Ils s’allongèrent à l’ombre de l’apocalypse qui s’étendait sous leurs yeux. Et dans un élan empli d’espoir, ils s’aimèrent de toutes leurs forces.



Paris, le 23 Juin 2008

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17 juin 2008 2 17 /06 /juin /2008 17:00











Aujourd’hui, j’ai 10 ans. Mes grands-parents me laissent carte blanche pour le week-end. Je suis libre de faire tout ce qu’il me plaît même de me goinfrer de friandises si ça me chante !


Depuis des mois, j’économise sous après sous. Au fil des jours, j’ai accumulé un trésor soigneusement rangé dans ma précieuse escarcelle. Grâce à ce pécule, je vais enfin pouvoir concrétiser la plus belle des fêtes. Une fête encore plus féerique que toutes celles que j’avais osées imaginer dans mes rêves les plus fous. Pour cette occasion très spéciale, j’ai convoqué mes fidèles lutins. Je sais que je peux compter sur eux. Jamais, ils ne me feraient le coup de la grève. Ils n’ont pas fermé l’œil de la nuit œuvrant comme des bêtes de somme afin de m’offrir le plus beau des anniversaires. Alors, ne nous égarons pas et place à l’inspection ! Tout doit être parfait dans les moindres détails. Un seul mot d’ordre : de la constance en toute circonstance !


Les derniers détails du canevas ayant été transmis la veille au soir à mes chers compagnons, les lutins, un ultime coup d’œil me permettra de m’assurer que tout est fin prêt. Mais voilà que je suis stoppée dans mon élan par Daisy le chef des lutins. Impossible de faire un pas de plus. Mince alors, vu l’air décidé de mon amie, pas moyen de négocier une percée dans la salle principale où tout doit être en ordre pour la fête de l’année. Mais, qu’est-ce que j’entends derrière la porte ? Ne serait-ce pas des murmures étouffés ? Y aurait-il un contretemps, une difficulté de dernière minute ? Ah mais non, ça ne va pas se passer ainsi, c’est moi qui vous le dis ! D’un brusque mouvement de la main, j’écarte Daisy qui tente une ultime fois de me barrer le passage en vain. En un rien de temps, me voici engouffrée dans le vaste séjour où quelques fagots de bois crépitent dans la cheminée. Groupés autour de l’âtre, tous mes amis, ma famille, tous les gens que j’aime sont là, auprès de moi en cette belle journée d’été où le solstice est à son apogée. Venus me chanter la sérénade, c’est à l’unisson qu’ils me souhaitent un bel anniversaire.

Submergée par l’émotion, je ne puis estomper plus longtemps les perles qui me montent aux yeux. Tant d’amour m’emplit le cœur que je ne sais comment les remercier d’être là avec moi, pour moi, ils ne sont rien qu’à moi. Alors, dans un sanglot rieur, je scande aussi distinctement que possible : « Merci les amis et que la fête commence ! ».

Paris, le 17 Juin 2008

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8 juin 2008 7 08 /06 /juin /2008 18:29











C’est univoque ! Le siphon bouché, il faut œuvrer le plus rapidement possible avant que nos invités ne débarquent. Cette puanteur emplit la cuisine de secondes en secondes. C’est une véritable infection ! A se demander si ce n’est pas un de ces espèces de rat des champs qui s’est bêtement engouffré puis coincé dans ce tuyau. Oui, ce serait plausible. Il faut dire qu’une authentique filière de rongeurs s’est installée dans la région il y a quelques mois. De quoi faire jaser les habitants à au moins 10 kilomètres à la ronde. C’est dire ! Les villageois ne s’imaginaient pas que ces satanées bestioles viendraient s'établir au nez et à la barbe de tous. Mais, au fil des jours, ces rats infects avaient charrié avec eux des remorques de fatras indéfinissable. Alors là, c’était certain, aucun doute possible. Ces nuisibles étaient là pour un bon moment et il faudrait faire avec. Leur multiplication et leur comportement m’avaient semblé louches mais jusqu’à présent ces mammifères rampants s’étaient tenus tranquilles, alors … Et puis, là ce matin, bang ! Ah, il fallait vraiment que ça tombe aujourd’hui. Un Dimanche ! Jour de barbecue ! Quelle déveine ! J’en piaffe de rage. Mais, j’y pense. S’aboucher avec leur chef, lui envoyer un bristol serait peut-être LA solution afin de vivre en bonne intelligence. Après tout, ce sont aussi des créatures du Seigneur. Dominons notre dégoût, faisons bonne figure. Aujourd’hui, Ils sont nos nouveaux voisins. Demain, …



Paris, le 8 Juin 2008
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7 juin 2008 6 07 /06 /juin /2008 21:46










D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours entendu parler de lui. Et voilà qu’aujourd’hui, il sera dans notre village. Vous rendez vous compte ? Une légende vivante parmi nous ! Tout près de moi. Peut-être pourrais-je l’approcher. Toucher du doigt l’objet de mes rêves. Ses combats, son rôle politique, son soutien pour une Arabie unie et par-dessus tout, ses équipées à travers le désert m’ont toujours fascinée. J’ai suivi ses aventures depuis que je suis en âge de lire et c’est grâce à lui si j’ai une telle passion pour les fouilles archéologiques. Je me rappelle encore avec émotion ses toutes premières fouilles au Sud de la Turquie, près de Jerablus à Karkemish rendues célèbres à travers le monde entier. Tout le monde en parlait. Je n’étais qu’une gosse mais ces mystères me transportaient dans un autre univers : je me voyais à ses côtés, déterrant quantités d’objets précieux enfouis depuis des millénaires comme on exhume des dépouilles pour leur accorder une nouvelle vie. C’est ce qu’il croyait. Ce tour de force est assurément l’oeuvre d’un magicien. Personne d’autre ne serait capable d’un tel prodige.

 

Enfant, à la question : « Maya, que veux-tu faire lorsque tu seras grande ? ». Je répondais fièrement et sans la moindre hésitation : « Aventurière comme Lawrence ! ». Alors, les adultes me jaugeaient avec condescendance et riaient tout en se moquant gentiment de moi. Mais leur perplexité ne faisait qu’accroître ma conviction. Voilà pourquoi la venue de Lawrence était si importante pour moi. Peut-être allait-elle changer le cours de ma destinée … Ce matin-là, j’étais la première debout, sur le pied de guerre, prête à accueillir mon héros. J’avais appris par la gazette locale que Lawrence venait de quitter la péninsule du Sinaï pour emprunter la route de Carchemish puis celle de Pétra avec ses compagnons arabes. Pétra, la ville où il venait tout juste d’éviter un incident diplomatique. Un général allemand avait réprimé la révolte des cheminots arabes par un coup de fusil. Un homme était mort. Cette injustice, cet ignoble abus de pouvoir avaient soulevé la colère de ses camarades. Appelé à la rescousse, Lawrence avait su trouver les mots justes parvenant à calmer le désarroi de ces hommes exploités, payés une misère, six sous le mois.

 

Lawrence était devenu l’un des leurs. Durant toutes ces années de traversée du désert, il avait appris leur culture, leur langue et leurs dialectes. Son charisme, son sens de la diplomatie, sa compréhension des peuples, son courage et son héroïsme avaient fait de lui un élément incontournable de l’Orient. Son cheval de bataille : libérer les arabes du joug ottoman et européen. Son projet : un grand empire arabe placé sous influence britannique. Il était devenu leur chef, un roi sans couronne.

 

C’était le grand jour, Lawrence et ses troupes allaient faire halte dans notre cité afin de se ravitailler pour ensuite rallier Aqaba, un petit village de pêcheurs que sa position géographique (entre la Palestine, la Transjordanie et la Péninsule arabique) rendait stratégique. Lawrence l’a très vite compris. Il veut y établir un centre de communication terrestre entre l’armée britannique qui piétine en plein Sinaï et les forces arabes engagées dans le Hedjaz. Ses hommes sont prêts à se battre. Ils sont prêts à mourir pour lui. Pour ma part, tout se jouerait dès à présent. Malgré mon jeune âge, j’y avais beaucoup réfléchi et ma décision était prise. Je partirai coûte que coûte combattre à ses côtés. Sa cause est noble, elle serait mienne. Faire honneur à mon héros d’enfance ; rien ni personne ne pourrait m’en dissuader. D’ici quelques instants, je lui parlerai.

 

A peine avais-je eu le temps de formuler ma pensée que je le vis. Tel un bédouin, il était enrubanné d’un turban bleu marine donnant une intensité supplémentaire à son regard azuré. Il avait encore plus fière allure que sur les photos des illustrés. Elancé, le visage fin, le regard franc de ceux qui n’ont rien à cacher. En le voyant, là, il me plut davantage encore. Le doute n’était plus permis. J’étais prête à braver n’importe quelle armée pourvu que Lawrence soit notre guide. C’est d’ailleurs les premières paroles que je prononçais lorsque je vins le saluer pour lui souhaiter la bienvenue parmi nous. Contrairement aux autres adultes, il ne riait ni ne souriait. Cette requête semblait lui paraître légitime et d’un hochement de tête il me fit comprendre son approbation. Je n’en revenais pas. Pas une hésitation. Aucune discussion n’avait été nécessaire pour lui faire sentir mon désir impérieux de le servir. D’un seul regard, nous nous étions compris.

 

En toute hâte, je fis mon paquetage en prenant bien soin de n’éveiller aucun soupçon et me glissais hors de la maison sans que personne ne puisse me remarquer. En l’espace de quelques minutes, le cours de ma vie avait changé. Un regard avait suffi pour que Maya devienne quelqu’un. Lawrence avait eu ce pouvoir. Sur ma vie, je ne le décevrais pas. En rejoignant, le groupe de mes nouveaux compagnons, je savais que je ne reverrai plus ma famille. Mais ce n’était pas grave. Je n’avais aucune tristesse au fond du cœur bien au contraire. Ma vie n’était plus ici mais bien aux côtés de Lawrence. Ma famille, c’était lui. J’en éprouvais une joie intense. J’étais légère, si légère. Ma vie pouvait enfin commencer.

 

Le ravitaillement clos, le temps était venu de partir et de lever le camp. C’est ainsi que par une belle journée de printemps, nous prîmes le chemin à la conquête du désert. Durant des jours et des semaines, nous traversâmes un désert hostile, des montagnes sans noms, des vallées sans route et des étendues sans fin. Jamais aucun des compagnons ne se plaignit. Nous avions une quête. Nous la poursuivions. Lawrence était notre chef et nous savions que lui seul mènerait la révolte jusqu’à son triomphe. Il était incontestablement l’homme de la situation. Grand, souple, fort et empli de convictions, il pouvait sans nul doute rendre justice à la cause arabe à son terme. Et grâce à Dieu, je serai là pour l’y aider.

 

Durant notre périple, Lawrence était parvenu à fédérer les tribus bédouines autour du chef de La Mecque, Hussein, et de son fils, l’émir Faysal. Son courage, son héroïsme au combat et ses talents de diplomate avaient su conquérir le cœur de l’Orient. Il n’avait plus rien à prouver et il n’eut aucune difficulté à rallier à sa cause des hommes influents, prêts à se battre à nos côtés. Le dénouement était proche. Nous le sentions. Etait-ce l’atmosphère orageuse et moite qui nous faisait pressentir l’attaque imminente ou bien encore cette espèce de tension qui grondait dans les rangs ? Je ne saurai le dire avec précision mais le doute n’était plus permis. La fébrilité de nos escadrons était manifeste et palpable. L’objectif était clair : ne pas faire de quartier, aller jusqu’au bout quoiqu’il en coûte.

 

C’est pourquoi après avoir organisé une série de diversions et d’opérations de harcèlement contre les trains militaires d’Aqaba, Lawrence nous fit un signe de la main nous intimant l’ordre de donner l’assaut. L’excitation était à son comble. Chevaux aux galops, nous foncions droit sur les Ottomans qui nous bombardaient d’une pluie de coups de feux que nous fendions aveuglément. Nous étions lancés et rien ni personne ne pourrait nous arrêter dans notre élan et notre soif de victoire. Nos troupes étaient déchaînées. Corps et âmes, jeté dans le combat, une centaine d’hommes chargea de toute sa force sur l’ennemi, massacrant tout sur son passage, bousculant les positions ottomanes. Quant à Lawrence, il ne ménageait pas ses efforts et nous exhortait à aller de l’avant, défiant les dangers qui l’entouraient en bataillant avec davantage de vaillance encore. Pour ma part, j’avais le feu aux joues. Pas un instant, je ne lâchai de vue Lawrence. Je ne percevais plus les cadavres qui s’amoncelaient autour de moi. Les yeux rivés sur Lawrence, mon regard ne voyait plus que lui. Submergée par l’émotion, je n’entendais rien des déflagrations qui sifflaient au-dessus de ma tête. N’était-ce pas pour lui que je m’étais engagée dans cette bataille ? Lui seul pouvait me donner la force nécessaire. Mon amour pour Lawrence était mon trésor le plus précieux. Rien n’était plus beau et plus gratifiant. A cet instant, mon cœur débordait d’une infinie gratitude pour cet homme venu du désert par une belle matinée où tout avait basculé. Maya n’était à ce moment-là qu’une enfant. Aujourd’hui Lawrence avait fait de moi une femme. Une femme heureuse. J’allais m’élancer vers lui lorsqu’une balle vint me toucher de plein fouet, droit dans le cœur. Basculant de mon pur-sang, je m’effondrais sur le sol sans comprendre ce qui m’arrivait. Lawrence n’était qu’à quelques pas de moi. Il n’avait rien vu. Il continuait bravement à se battre. Le sang des opposants volait dans les airs projetant des tâches rouges écarlates dans le ciel. Je me rappelle m’être dit à cette seconde : « Quel artiste ! ». Et dans un dernier souffle, j’eus la force de sortir de la poche de ma chemise le billet que Lawrence d’Arabie m’avait griffonné avant de partir à l’assaut : « Je t'aimais ; c'est pourquoi, tirant de mes mains ces marées d'hommes, j'ai tracé en étoiles ma volonté dans le ciel afin de te gagner la Liberté, la maison digne de toi, la maison aux sept piliers ainsi tes yeux brilleraient peut-être pour moi lors de ma venue. ».



Paris, le 7 Juin 2008


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30 mai 2008 5 30 /05 /mai /2008 21:48












Voilà maintenant des mois et des mois que la pluie ne cesse de tomber sur la capitale chinoise laissant mon moral aux confins du désespoir. La grisaille de Pékin me rend plus irascible. Pour le bien-être de tous, il est grand temps que soleil et lumière viennent caresser mon visage. Ce visage offert à une irrépressible envie de renaissance. J’ai tellement soif de vie et d’aventures qu’il me tarde de reprendre le chemin de l’insouciance, éloigné de toutes vicissitudes.

 

Profitant de l’invitation de mon ami, Ren Jie, à venir prendre le thé, je tourne résolument le dos à ces derniers mois de torpeur et saisis cette occasion pour me lancer à la recherche d’un environnement plus hospitalier que l’espèce de bouge dans lequel je suis cloîtrée depuis bientôt onze mois. Bien que la saison des pluies touche à sa fin, le carnage est encore visible dans les rues boueuses des faubourgs. Les égouts à ciel ouvert dégagent une odeur pestilentielle et cette puanteur me fait tourner de l’œil à chaque nouveau pas. C’est donc en toute hâte que je m’élance à travers les ruelles pour échapper aux affres de l’insalubrité purulente.

 

Une heure plus tard, moite et crottée, j’arrive enfin au seuil de la luxueuse demeure de mon ami. Devant ma mine débraillée, j’ai quelques scrupules à me présenter ainsi. Va-t-il me reconnaître ? Le hasard avait bien voulu nous réunir deux ans auparavant à l’occasion d’un congrès auquel j’assistais en tant que membre de la délégation française des Jeux Olympiques alors que Ren Jie venait traiter d’importants contrats commerciaux avec des partenaires qataris. C’est ainsi, au China World Hotel que nos routes s’étaient croisées dix-huit ans après avoir quitté les bancs de l’université américaine où nous avions brillamment terminé nos Masters.

 

Aujourd’hui, me voilà à l’orée de sa résidence et j’avoue être gagnée par une douce fébrilité à l’idée de me trouver face à une personne dont le chemin a pris d’autres virages. Je ne sais plus rien de ce jeune étudiant devenu un homme, un mari, un père peut-être, un étranger sans doute. Malgré une brève hésitation, la curiosité reste plus forte que tout et l’excitation cède le pas à l’anxiété. Alors que je m’apprête à actionner le carillon, les portes s’ouvrent devant moi sur un jeune homme qui me fait signe d’avancer. A croire que dans ce pays, les portes ont des yeux et des oreilles ! Le serviteur de la maison ne me laisse pas le temps de dire quoique ce soit que ce dernier m’ouvre la porte sur un monde que je n’avais jamais imaginé.

 

Des lustres en cristal surplombent une large entrée richement décorée d’objets venus du monde entier ce qui me laisse supposer que mon ami a dû beaucoup voyager durant ces années, accumulant une foultitude d’objets précieux et bigarrés lors de ses déplacements. Deux éléphants attirent immédiatement mon attention. Ils ornent l’entrée de part et d’autre accueillant leurs hôtes avec une solennité intimidante. Incroyablement imposants, ils sont sertis de superbes rubis rouges flamboyants et déploient de magnifiques défenses en ivoire d’une longueur interminable. Il émane d’eux une puissance carnassière étonnante. Le serviteur de Ren Jie m’invite à pénétrer dans un second vestibule, plus intime, et m’installe dans un fauteuil de velours rouge. Je n’ose m’y poser de peur de maculer cette belle matière. Profitant de la discrétion toute relation du serviteur, je m’époussette prestement avant de prendre place dans le lourd fauteuil. Bien calée, je tends les bras jusqu’à la console placée devant moi afin de saisir la collation que l’on vient de m’offrir. C’est une citronnade bien fraîche qui je dois l’avouer est la bienvenue après le périple que je viens d’accomplir pour parvenir jusqu’ici. Je m’en saisis prestement et bois le breuvage avec une grande avidité. Après l’agitation grouillante de la rue, le calme ambiant me fait le plus grand bien. Un instant, je ferme les yeux pour écouter le bruit des pâles ronronnant du plafonnier. Je commence enfin à me détendre. C’est alors que Ren Jie fait son apparition.

 

Je suis frappée par la beauté de ce jeune homme élancé tout de blanc vêtu qui se tient face à moi avec un tel sérieux que j’en reste totalement muette. Il se dégage de sa personne une force magnétique, énigmatique des plus charismatiques. Je tente tant bien que mal de contenir mon éblouissement. Je me redresse et me donne une certaine contenance en lui offrant, je l’espère, l’un de mes plus beaux sourires. Mon invite semble le ravir puisqu’il me tend les mains et m’offre une accolade qui m’électrise de la tête au pied. J’en ai les jambes qui tremblent. Je m’agrippe à lui comme à une bouée de secours. Quant à Ren Jie, il semble aussi à l’aise que je suis désemparée, devisant de tout et de rien comme si nous nous étions quittés la veille. Son assurance et son aisance finissent par me mettre tout à fait en confiance et sa sérénité envahit l’espace jusqu’à prendre possession de moi. Moi qui, il y a à peine quelques secondes, étais pétrifiée, je me sens dorénavant étrangement dépourvue de complexes et d’embarras. La conversation prend alors un tour tout à fait agréable et familier que je n’avais jamais connu auparavant avec quiconque. A tour de rôle, nous échangeons nos pensées les plus intimes partageant nos doutes, nos peurs et nos espoirs. Le temps passe si vite que je n’ai pas vu la nuit tomber. « Parfait, me lance Ren Jie, maintenant que je te tiens, je ne vais pas te laisser t’envoler comme ça ! ». Tout naturellement, nous décidons de ma présence cette nuit même dans son palais des mille et une nuits. J’ai l’impression d’être une princesse tant le temps semble s’être suspendu.

 

Après avoir babillé à bâton rompu, nous nous dirigeons vers une vaste salle à manger où nous attend un nombre indéfinissable d’agapes qui me mettent aussitôt l’eau à la bouche. Les plats sont plus appétissants les uns que les autres et j’avoue ne plus savoir où donner de la tête. Après avoir pris place à la table que les serviteurs ont dressée pour nous, une jeune fille me présente un large plat en porcelaine bleu et blanc dans lequel est disposée une variété de fruits de mer. S’ensuit une farandole de raviolis fourrés à la vapeur d’une légèreté telle que je me sens subitement l’âme d’une véritable ogresse vorace. Tout me fait envie même les hamsters aux oranges de Laogan dont la chair est si délicieusement parfumée d’agrumes.

 

Au détour d’une bouchée de beignet au litchi, je surprends le regard gourmand de Ren Jie posé sur moi. Rose de confusion, je fais mine de n’avoir rien remarqué et continue à piocher dans la corbeille de fruits où néfliers, grenades, kakis et papayes se disputent mes faveurs. Mais à quoi bon feindre ? Cela n’a aucun effet sur l’audace de mon ami qui me dévore des yeux. Que cherche-t-il donc à provoquer en moi ? Serait-il joueur par le plus grand des hasards ? Je n’ose faire quoique ce soit ne serait-ce qu’émettre un battement de cil. Prenant mon courage à deux mains, je repose la lamelle de goyave que je m’apprêtai à savourer et le plus calmement du monde plante mes prunelles au plus profond des siennes jusqu’à pouvoir y lire ses secrets les plus inavouables. Dans un silence religieux, nous restons ainsi immobiles, les yeux dans les yeux. Les portes de la salle à manger sont désormais closes et les serviteurs retirés en cuisine. Nous sommes seuls au monde, face à face. Je ne le lâche pas du regard essayant de percer le mystère de l’Orient mais Ren Jie, solidement campé en moi, ne me laisse que peu d’indices.

 

La plupart des bougies se sont consumées et nous baignons à présent dans une pénombre apaisante où seul le souffle de nos respirations impatientes se fait entendre. Soudain, Ren Jie rompt le silence et tel un fauve se coule derrière moi. Je ne bouge pas. Tous mes sens sont en éveil. J’attends telle une proie consentante face à ce fauve affamé. Enfin, il se penche sur moi et pose ses mains sur mon cou. Je sens son souffle descendre sur ma nuque. Des frissons parcourent mon échine. Dieu, que c’est bon ! Ses lèvres s’attardent sur mon cou. Je frémis d’impatience. Nos lèvres se rapprochent. Elles vont se toucher. S’embraser. Mais non, ce n’est pas le sel de sa  bouche que je goûte mais celui du sang.

 

Une brûlure sur ma joue. Une gifle ? Deux gifles, trois gifles, une volée de coups s’abat sur moi. Je ne suis pas chez Ren Jie. Je suis dans un bouge infâme. Les vapeurs de l’opium commence doucement à se dissiper et me laisse entrevoir enfin les contours de la pièce dans laquelle je me trouve. Cinq ou six jeunes filles sont entassées sur un matelas à même le sol. Je trône parmi elles, les vêtements défaits, emplis de la sueur et du sperme de ces brutes dont les relents me montent au nez comme la nausée. Je me sens mal. J’ai envie de vomir. J’ai la tête si lourde, les jambes en coton. Je n’arrive pas à me lever alors je tente de me redresser. L’un des types me regarde d’un air goguenard. Je le hais. J’aimerais lui cracher à la figure, lui lacérer le visage, lui crier toute ma haine et mon dégoût. Les jeunes filles à mes côtés sont encore dans le cirage. Elles semblent si jeunes. Et pourtant, elles sont déjà marquées par la vie. Pauvres de nous. Mon Dieu ayez pitié de nous ! Moi ici, c’est absurde, pathétique. Comment ai-je pu ?... Mais, qu’est-ce que j’entends ? Est-ce Dieu qui vient de m’envoyer un signe ? Oui, c’est lui. Je veux bien le croire. En un éclair, j’ai repris mes esprits. Mon corps repose sur ce matelas crasseux mais mon esprit n’y est plus. Ils ne peuvent plus m’atteindre. Je ne suis plus là.  Il faut que je parte. Que je m’envole ! Oui, j’en suis sûre, ma vie n’est pas ici. Demain. Demain sera un autre jour …



Paris, le 30 Mai 2008
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